Commerce équitable: la mondialisation citoyenne
Philippe FREMEAUX, Isabelle RENAUD
Alternatives Economiques n° 188 - janvier 2001
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Le commerce équitable établit une relation de solidarité directe entre consommateurs du Nord et producteurs
du Sud.
Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable lui assurant, ainsi qu'à sa famille, une
existence conforme à la dignité humaine." C'est en vertu de ce principe formulé dans la Déclaration
universelle des droits de l'homme qu'est né le commerce équitable. L'idée est simple: garantir un revenu
correct aux producteurs des pays en développement dont nous consommons les productions. Le moyen:
acheter café, cacao ou thé à un prix stable, sans se préoccuper des variations des cours mondiaux des
matières premières. De quoi non seulement accroître leurs revenus, mais aussi annuler les effets de ces
variations brutales des cours, qui rendent impossible toute prévision de revenu et leur interdisent donc
d'emprunter pour investir et sortir de la pauvreté.
Alors que la mondialisation, en rapprochant les hommes, rend toujours moins tolérables les inégalités de
conditions de vie et de revenus sur la planète, les Etats et les institutions internationales se révèlent incapables
de réguler de manière satisfaisante le commerce international, notamment pour les produits de base. Ainsi, le
café a vu son cours baisser de moitié en un an, passant de plus de 1,3dollar la livre en décembre 1999 à
0,65dollar aujourd'hui.
La question est d'abord politique: aucune loi absolue n'impose que les cours des produits agricoles subissent
des variations brutales et finissent toujours par retomber à un niveau bas. Ne sommes-nous pas parvenus, au
sein de l'Union européenne, par la politique agricole commune (Pac), à mettre en place des mécanismes qui
assurent des revenus corrects et réguliers aux producteurs agricoles? Les Etats souhaitaient défendre les
revenus de leurs agriculteurs. Ils y sont parvenus en agissant, au sein de l'espace européen, sur les prix ou les
sur quantités. Reste qu'au niveau international, cette volonté de solidarité n'existe pas, ni la capacité à réguler
les quantités, comme l'ont montré les difficultés qu'ont les pays producteurs à répartir des quotas de
production permettant d'éviter la tendance chronique à la surproduction.
Refusant de considérer cet état de fait comme une fatalité, les organisations de commerce équitable
s'efforcent d'y remédier en agissant à la base. A l'initiative d'associations de solidarité internationale au Nord,
des canaux de distribution parallèles ont été progressivement mis en place, assurant des débouchés privilégiés
à des communautés rurales du Sud, qui obtiennent ainsi une rémunération plus juste de leur travail.
Etats mous, citoyens offensifs
L'idée des promoteurs du commerce équitable part du constat que la seule loi du marché ne peut suffire à
régir les relations entre les êtres humains. En buvant du café ou en croquant du chocolat, nous entrons en
relation avec ceux qui l'ont cultivé, même à l'autre bout du monde. Et ces producteurs ont droit, eux aussi, à
bénéficier d'un niveau de revenu correct, comme s'ils étaient nos voisins ou nos collègues de travail. Puisque
les Etats se refusent à remplir cette mission de régulation et de redistribution au niveau de l'économie
mondiale, c'est à nous, par une démarche volontaire, d'apporter notre pierre à la construction d'une
mondialisation plus citoyenne, plus soucieuse du bien de tous.
Au final, le surcoût supporté par le consommateur reste très minime, dans la mesure où le prix payé au
producteur n'explique que pour une faible part le prix final des produits, compte tenu des coûts -et des
marges- au niveau du transport, de la transformation, du conditionnement et de la distribution.
Il ne faut évidemment pas trop attendre du commerce équitable. Il améliore, certes, les conditions de vie des
communautés rurales qui en bénéficient. Mais, dans des pays où l'Etat est souvent plus prédateur que
développeur, le commerce équitable ne peut suffire à permettre une réelle sortie du sous-développement. Ildéveloppement.
Une attente de l'opinion
La démarche équitable semble en tout cas promise à un bel avenir, dans la mesure où elle répond à une
attente de l'opinion. Selon un récent sondage Ipsos, réalisé en octobre dernier pour la Plate-forme pour le
commerce équitable, qui rassemble les principales associations, seuls 9% des Français avaient entendu parler
du commerce équitable, alors qu'ils sont 77% à juger les pratiques du commerce Nord-Sud inéquitables. De
quoi laisser espérer un rapide développement, à condition que la distribution joue le jeu et que les produits
soient au rendez-vous. Pour l'instant, cela marche plutôt bien: alors que seulement 270tonnes de café avaient
été vendues en France en 1999 sous les labels équitables, les ventes devraient atteindre 600tonnes en 2000,
grâce à une meilleure notoriété et une présence fortement accrue dans la grande distribution.
Les produits équitables, longtemps diffusés seulement via des canaux spécifiques -en particulier dans les
93boutiques du réseau Artisans du monde-, sont en effet désormais disponibles dans les linéaires de la
grande distribution, notamment chez Monoprix, Auchan, Carrefour, Casino, Continent, Cora et Leclerc.
D'autres distributeurs devraient suivre prochainement. L'association Max Havelaar, d'origine néerlandaise, qui
labellise des produits, a joué un rôle essentiel dans cette mutation, partant de l'idée qu'il fallait être présent là
où les gens font leurs courses. C'est sans doute la condition pour accroître les parts de marché des produits
équitables, et donc réussir à influer significativement sur le sort des populations au Sud. Reste que les
boutiques spécialisées ne vendent pas seulement des produits; elles permettent aussi à ceux qui s'en occupent,
généralement bénévolement, d'entrer en relation avec les consommateurs, de remplir une mission d'éducation
populaire et de mobilisation citoyenne autour des questions de développement. Les deux démarches sont
donc complémentaires, de même que le commerce équitable est complémentaire d'autres formes de
contestation de la mondialisation libérale.
Commerce équitable, adresses
Fédération Artisans du monde, 93 boutiques associatives spécialisées dans les produits équitables, 3, rue
Bouvier, 75011 Paris, tél.:0143723737, Web: www.globenet.org/artisans-du-monde
Max Havelaar France, principal label présent dans les grandes surfaces, 41, rue Emile-Zola, 93107Montreuil
Cedex, tél.:0142877021, Web: www.maxhavelaarfrance.org
Solidar'monde, importateur militant qui propose plus de 1500références de produits équitables, 86, rue
Berthie-Albrecht, 94400Vitry-sur-Seine, tél.:0145766543, mel: solidarmonde@wanadoo.fr
Commerce équitable: pas seulement le café
Le café représente encore près de la moitié du chiffre d'affaires réalisé au niveau européen par les filières
équitables, avec 800millions de francs sur un chiffre d'affaires de 1650millions de francs (données 1999).
Mais on peut aussi trouver du miel, du sucre, des produits à base de cacao, du thé, du riz et de nombreux
fruits tropicaux ou méditerranéens: banane, ananas, mangues, agrumes et jus d'orange. 15% du marché suisse
de la banane sont ainsi contrôlés par les filières équitables.
Enfin, plusieurs importateurs et quelques boutiques distribuent des objets artisanaux en provenance de pays
du Sud: Andines, Artisans du Soleil, Artisal, Alter Eco, Aspal, etc. Certaines de ces structures sont
associatives, d'autres sont des sociétés commerciales classiques.
Article issu du dossier Commerce équitable: l'autre mondialisation
Philippe FREMEAUX, Isabelle RENAUD
Alternatives Economiques n° 188 - janvier 2001
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Résumé : Le commerce équitable a un but de solidarité entre le producteur du sud et le consommateur du nord. Il permet de leur donner un revenus correct, afin de subvenir a leurs besoins. Cette sorte de commerce permet le développement de ces pays, à l'inverse de la mondialisation qui permet aux pays du nord de s'enrichir sur le dos des petits producteurs.